Le tableau d’Henri Fantin-Latour, Coin de table (1872), met en scène :
Assis : Paul Verlaine, Arthur Rimbaud, Léon Valade, Ernest d’Hervilly, Camille Pelletan.
Debout : Pierre-Elzéar,  Émile Blémont, Jean  Aicard.

     C’était Émile Blémont qui avait réuni ces jeunes poètes, à la demande du peintre. Verlaine et Rimbaud lui en furent toujours reconnaissants. Rimbaud lui fit don du manuscrit original de son Sonnet des voyelles (actuellement au Musée Rimbaud de Charleville-Mézières); Verlaine lui consacra un sonnet de remerciements, car Blémont n’abandonna jamais « le Pauvre Lélian » dans ses malheurs.

Nouveaux vers pour Fantin-Latour

… Il était vraiment beau
Et fort solidement brossé, le grand tableau
Où nous groupant alors, nous, les jeunes poètes,
Sur la nappe, au dessert, vous dressâtes nos têtes.
Là, quel tas de rimeurs : d’Hervilly, Pelletan,
Léon Valade sous sa barbe de Persan,
Et Verlaine, et Rimbaud avec sa face énorme,
Et le bel Elzéar en chapeau haut de forme !…
Émile Blémont. La Belle Aventure, 1895.

*

À Émile Blémont

La vindicte bourgeoise assassinait mon nom
Chinoisement, à coups d’épingle, quelle affaire !
Et la tempête allait plus âpre dans mon verre.
D’ailleurs, du seul grief, Dieu bravé, pas un non,
Pas un oui, pas un mot ! L’opinion sévère,
Mais juste, s’en moquait, autant qu’une guenon
De noix vides. Ce bœuf bavant sur son fanon,
Le public, mâchonnait ma gloire… Encore à faire.
L’heure était tentatrice, et plusieurs d’entre ceux
Qui m’aimaient, en dépit de Prud’homme complice,
Tournèrent, carrément, furent de mon supplice,
Ou se turent, la Peur les trouvant paresseux.
Mais vous, du premier jour vous fûtes simple, brave,
Fidèle : et dans un cœur bien fait cela se grave.

Paul Verlaine, Amour, 1888.